LES INCIDENCES DE LA CRISE SANITAIRE SUR LE DROIT JUDICIAIRE FRANÇAIS
Guillaume Payan - noiembrie 26, 2021Résumé
L’adoption de l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020 «portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux copropriétés» et celle du décret n°2020‑1405 datant du même jour, ont pour finalité d’assurer la continuité de l’activité juridictionnelle durant la période couverte par l’état d’urgence sanitaire, au moyen d’une réorganisation du fonctionnement des juridictions. Pour nombre d’entre elles, les solutions dérogatoires retenues en réaction à la COVID‑19 et à ses conséquences ne sont pas totalement inconnues du droit judiciaire français. L’innovation porte moins sur la nature des règles mises en place, que sur l’intensité de la dérogation apportée par rapport au droit commun de la procédure civile. Trois axes semblent avoir guidés le pouvoir règlementaire, à savoir: adapter la formation de jugement (dispositif de transfert de compétences juridictionnelles et limitation du nombre de magistrats devant siéger), aménager les audiences (accès limité, dématérialisation ou suppression) et simplifier les échanges entre les parties et avec les juridictions (prédominance des échanges «par tout moyen»).
Mots‑clefs: Droit judiciaire français, COVID‑19, Audiences, Transfert de compétences juridictionnelles, Dématérialisation, Échanges par tout moyen.
1. À l’instar de ses homologues étrangers, le gouvernement français a adopté de très nombreuses mesures afin de limiter les conséquences désastreuses de la crise sanitaire liée à l’épidémie de COVID‑19[1]. La plus emblématique est sans doute celle que l’on qualifie généralement de «confinement de la population». Cette mesure, qui vise à limiter les déplacements de la population sur le territoire national, a été mise en œuvre pour la première fois durant la période allant du 17 mars au 21 mai 2020. Par la suite, cette mesure a été reconduite – dans une formule plus allégée – à l’autonome 2020 et au printemps 2021. Parallèlement, l’état d’urgence sanitaire a été déclaré, puis prorogé par des lois successives[2].
Pour s’en tenir au plan juridique et, singulièrement, au domaine du droit judiciaire, en dépit de ce contexte difficile, il s’est agi d’assurer la continuité de l’activité juridictionnelle[3]. La poursuite d’un tel objectif a conduit le pouvoir règlementaire à privilégier des règles qui, à défaut d’être totalement inédites en droit français, n’en sont pas moins dérogatoires au regard du droit commun de la procédure civile.
2. Une mosaïque de textes
La mise en place d’un confinement de la population n’est évidemment pas sans conséquence sur le fonctionnement de la justice. Ce confinement ayant été plus ou moins strict et non continu, il n’est guère surprenant de constater un «empilement» de textes visant à «adapter» le droit judiciaire lors des périodes considérées. À cet égard, ont été successivement adoptées des ordonnances[4] «portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux copropriétés». On relève principalement l’ordonnance n°2020‑304 du 25 mars 2020[5], l’ordonnance n°2020‑595 du 20 mai 2020[6] ou encore l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020[7]. Cette dernière ordonnance – qui a été accompagnée par l’adoption, le même jour, du décret n°2020‑1405[8] – retiendra particulièrement notre attention dans la présente étude[9].
Ainsi que leurs intitulés l’indiquent, l’ordonnance n°2020‑1400 et le décret n°2020‑1405 du 18 novembre 2020 s’appliquent aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale[10]. Sont ainsi visées l’ensemble des juridictions statuant en matière civile, commerciale, fiscale, sociale ou encore disciplinaire, au premier rang desquelles figurent – sauf précisions contraires – les tribunaux judiciaires et les conseils de prud’hommes (concernant le premier degré de juridictions) ainsi que les cours d’appel (pour le second degré de juridictions). Toujours au titre du champ d’application commun de cette ordonnance et de ce décret, il y a lieu de préciser que la mise en œuvre de leurs dispositions n’est envisagée que dans une période durant laquelle est en vigueur «l’état d’urgence sanitaire»[11]. Plus exactement, cette ordonnance et ce décret ont vocation à s’appliquer jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n°2020‑1257 du 14 octobre 2020 et prorogé dans les conditions prévues par l’article L. 3131‑13 du code de la santé publique[12].
3. Des solutions dérogatoires mais non inédites
L’innovation juridique durant cette période de crise sanitaire n’est pas aussi profonde que l’on pourrait le penser de prime abord.
Tout d’abord, on remarque que, pour certaines d’entre elles, les solutions dérogatoires retenues en réaction à la COVID‑19 et à ses conséquences ne sont pas totalement inconnues en droit français. Sans doute, leur justification est‑elle originale: le souci de célérité et de simplification procédurales traditionnellement évoqué, laisse ici la place à l’impératif de limiter les contacts physiques au sein des juridictions judiciaires et, en cela, de cantonner la propagation du virus. Cependant, si l’on perçoit des dissemblances avec des règles préexistantes, ainsi que nous le verrons, les différences portent moins sur la nature des dispositifs retenus, que sur l’intensité de la dérogation apportée par rapport aux règles ordinaires de procédure civile.
Ensuite, on discerne une certaine continuité dans les solutions privilégiées au sein des différentes ordonnances susmentionnées. En ce sens, il est le plus souvent question de reconduire des règles dérogatoires déjà mises en place au printemps 2020, au début de la crise sanitaire. Notons toutefois que toutes les mesures d’exception prévues dans l’ordonnance n°2020‑304 du 25 mars 2020 n’ont pas été reprises dans les textes subséquents. Ainsi en est‑il par exemple de la mesure prenant les traits d’une prorogation de certains délais échus pendant la période d’urgence sanitaire[13]. Ces quelques disparités peuvent s’expliquer par les différences d’intensité du «confinement».
4. Une réorganisation du fonctionnement des juridictions
Les mesures adoptées dans le domaine du droit judiciaire en réaction à la crise sanitaire ont en commun non seulement de permettre une réorganisation du fonctionnement des juridictions, mais également – au moins pour certaines d’entre elles – d’être soumises à la décision d’un magistrat. Cette solution emporte l’approbation car la nécessaire appréciation, par ce magistrat – le plus souvent, un chef de juridiction –, de chaque situation portée à sa connaissance, est de nature, sinon à tempérer la rigueur de certaines mesures définies par le pouvoir règlementaire, du moins de limiter leur application aux seules situations dans lesquelles des règles dérogatoires apparaissent indispensables.
Par ailleurs, si l’on approfondit l’analyse, au‑delà de ces traits caractéristiques communs, on perçoit trois idées‑force qui semblent avoir guidé le pouvoir règlementaire, à savoir: adapter la formation de jugement (I), aménager les audiences (II) et simplifier les échanges (III).
I. Adapter la formation de jugement
5. Une première série de dispositions se rejoignent autour de l’objectif d’adapter la formation de jugement aux contraintes sanitaires. À ce titre, il est notamment prévu la possibilité de transférer le traitement des litiges à une autre juridiction ou de réduire le nombre de magistrats appelés à siéger au sein d’une formation de jugement.
6. Le transfert de compétences juridictionnelles
Dans l’hypothèse où une juridiction judiciaire du premier degré se trouve dans «l’incapacité totale ou partielle de fonctionner», le premier président de la cour d’appel compétente désigne, par ordonnance[14], une autre juridiction de même nature et du ressort de la même cour d’appel, afin de «connaître de tout ou partie de l’activité relevant de la compétence de la juridiction empêchée»[15]. La juridiction ainsi désignée devient alors compétente pour traiter les affaires en cours à la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance de désignation. Il est à souligner que la décision s’impose aux parties et à la juridiction de renvoi.
De façon opportune, des précisions sont apportées quant à l’utilisation de cette mesure. Au titre de ces précisions – qui sont autant de garanties du respect des droits des justiciables contre un éventuel usage inapproprié de ce transfert de compétence territoriale –, on peut tout d’abord signaler que le premier président de la cour d’appel doit, au préalable, solliciter l’avis du procureur général près cette cour, des chefs de juridiction et des directeurs de greffe des juridictions concernées. Ensuite, concernant le contenu de cette ordonnance, il est exigé que le premier président de la cour d’appel y détermine les activités faisant l’objet du transfert de compétences ainsi que la date à laquelle ce transfert intervient. Enfin, il est fait en sorte que ce transfert de compétences soit connu par le plus grand nombre de praticiens et de justiciables. À ce sujet, l’ordonnance du premier président de la cour d’appel est publiée dans deux journaux diffusés dans le ressort de cette juridiction et fait l’objet de «toute autre mesure de publicité dans tout lieu jugé utile». En outre, elle est communiquée aux bâtonniers des Ordres des avocats des ressorts concernés ainsi qu’au Conseil national des barreaux, pour diffusion.
À titre de comparaison, il est permis d’indiquer que le code de l’organisation judiciaire[16] et le code de procédure civile français prévoient des hypothèses où un transfert de compétences peut être opéré d’une juridiction à une autre de même nature et de même degré, en dehors de tout contexte de crise sanitaire. C’est notamment le cas en matière de renvoi pour cause de suspicion légitime[17] – en présence de soupçons de partialité de la juridiction compétente – et du renvoi pour cause de sûreté publique[18]. Cependant, il s’agit alors de renvoyer une affaire donnée à une juridiction de même nature. Or, par hypothèse, le transfert de compétences dû à la crise sanitaire concerne, quant à lui, le traitement de nombreuses affaires. De même, la procédure à suivre est différente. Par exemple, en matière de renvoi pour cause de suspicion légitime, la décision de renvoi est prise par le premier président de la cour d’appel, mais l’initiative appartient à la partie qui met en cause le défaut d’impartialité d’une juridiction. Or, dans le dispositif prévu par l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020, les parties n’ont nullement l’initiative du transfert de compétences.
7. La limitation du nombre de magistrats devant siéger
Bien que le principe demeure celui de la collégialité, le droit français compte de nombreux cas où il est statué à juge unique. Tout d’abord, il existe des juges délégués ou des juridictions non autonomes qui statuent à juge unique, tels que le juge aux affaires familiales[19] ou le juge de l’exécution[20]. Ensuite, y compris lorsque les formations de jugement sont en principe collégiales au sein de la juridiction saisie d’une affaire, il peut exister une possibilité d’attribuer une affaire à un juge unique. C’est notamment le cas devant le tribunal judiciaire, conformément aux articles 812 et suivants du code de procédure civile.
Dans le contexte de la crise sanitaire[21], cette solution est généralisée. Ainsi, les juridictions peuvent, sur décision de leur président, statuer à juge unique en première instance et en appel dans l’ensemble des affaires qui leur sont soumises. Il est néanmoins exigé que le juge ainsi désigné soit un magistrat du siège – par opposition aux magistrats du parquet – et qu’il ne s’agisse ni d’un magistrat honoraire, ni d’un magistrat à titre temporaire[22].
Parallèlement à la généralisation de ces audiences à juge unique, des dispositions particulières sont prévues à l’égard des conseils de prud’hommes[23], lesquels sont compétents pour trancher les litiges individuels relatifs aux contrats de travail et ont la particularité d’être des juridictions paritaires[24]. Les concernant, il est indiqué que le président de la juridiction, après avis du vice‑président, a la possibilité de décider que ledit conseil statue en «formation restreinte comprenant un conseiller employeur et un conseiller salarié»[25]. La formation de jugement étant en nombre pair, le risque d’un partage des voix existe. Dans une telle hypothèse, l’affaire doit être renvoyée devant un juge du tribunal judiciaire dans le ressort duquel est situé le siège du conseil de prud’hommes. Ce magistrat statue après avoir recueilli – par tout moyen – l’avis des conseillers présents lors de l’audience de renvoi en départage. Si, au terme de la période d’application de l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020, ce juge n’a pas tenu l’audience de départage, l’affaire est renvoyée à la formation restreinte présidée par ce juge.
II. Aménager les audiences
8. Des solutions multiples et des dérogations graduelles
L’audience est un lieu privilégié pour l’exercice des droits de la défense. Cependant, il s’agit également d’un lieu de circulation potentielle du virus. Sans surprise, les rédacteurs de l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020 y portent donc une attention particulière. Plusieurs solutions sont envisagées, allant de la limitation de l’accès à la salle d’audience jusqu’à la suppression pure et simple de l’audience, en passant par la tenue d’une audience dématérialisée.
9. Limitation de l’accès à la salle d’audience
On le sait, le principe de publicité des débats compte parmi les garanties du droit à un procès équitable protégées par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. Son importance est également rappelée dans le droit français et notamment à l’article L. 111‑12 du code de l’organisation judiciaire. Cette publicité permet de préserver la confiance des citoyens dans le fonctionnement des tribunaux. Néanmoins, aussi important soit‑il, ce principe n’est pas absolu. Des exceptions sont admises. C’est ainsi que des débats à huis clos sont privilégiés notamment lorsque cela est nécessaire pour préserver la moralité, l’ordre public, le secret médical, l’intérêt des mineurs ou encore la vie privée des parties[26].
La crise sanitaire a conduit le pouvoir règlementaire à prévoir une restriction supplémentaire à cette publicité. Plus précisément, le juge compétent ou le président de la formation de jugement à laquelle a été soumise une affaire peut décider, avant l’ouverture de l’audience, que «les débats se dérouleront en publicité restreinte ou, en cas d’impossibilité de garantir les conditions nécessaires à la protection de la santé des personnes présentes à l’audience, en chambre du conseil»[27]. Afin d’atténuer l’impact de cette restriction de la publicité des audiences, on note avec intérêt la possibilité offerte aux journalistes d’assister à ces audiences, dans le respect des modalités définies – par ledit juge ou ledit président de la formation de jugement – pour permettre le respect des règles sanitaires en vigueur.
Plus généralement, il appartient aux chefs de juridiction de définir les conditions d’accès auxdites juridictions, aux salles d’audience ainsi qu’aux différents services accueillant du public, permettant d’assurer le respect des règles sanitaires[28]. De même, dans un ordre d’idées voisin, l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020 contient des dispositions ayant trait aux prestations de serment devant les juridictions. Les concernant, il est indiqué qu’elles peuvent être présentées au moyen d’un écrit qui comporte la mention manuscrite des termes de la prestation et qui doit être déposé auprès de la juridiction compétente, qui en accuse réception[29].
10. Dématérialisation de l’audience
Les potentialités offertes par les nouvelles technologies de la communication dépassent la seule communication dématérialisée des actes de procédure entre les parties et les juridictions[30]. Ces technologies rendent également possible la tenue d’audiences dématérialisées. À cet égard, dans le contexte de la crise sanitaire, le pouvoir réglementaire français a souhaité reconnaitre aux juges et aux présidents de formation de jugement la faculté de décider, par une décision non susceptible de recours, que l’audience «se tiendra en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle»[31]. Autrement dit, ce texte autorise l’usage de la visioconférence. Encore faut‑il, toutefois, que les structures concernées soient dotées de tels systèmes.
D’une part, avec raison[32], l’usage de cette faculté est entouré de certaines garanties[33]. Tout d’abord, le moyen utilisé doit permettre de s’assurer de l’identité des personnes qui y participent et doit garantir la qualité de la transmission et de la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats[34]. Ensuite, dans les mêmes formes[35] et sous les mêmes conditions[36], en cas d’«impossibilité technique ou matérielle de recourir à un tel moyen», ledit juge peut choisir d’entendre les parties et leurs avocats «par tout moyen de communication électronique, y compris téléphonique»[37]. Enfin, les moyens de communication employés par les membres de la formation de jugement doivent garantir le secret du délibéré[38].
D’autre part, il est admis que les différentes personnes qui interviennent lors d’une audience ou d’une audition[39] puissent se trouver dans des lieux distincts[40]. Il s’agit d’une précision de bon sens. En effet, sauf à viser ici le cas où les membres de la formation de jugement sont séparés, à quoi bon utiliser les nouvelles technologies de la communication, si c’est pour imposer que tous les protagonistes de l’audience se retrouvent dans les mêmes locaux ? Quoi qu’il en soit, cette donnée ne change en rien l’office du juge et la mission du greffe. Tout comme cela est traditionnellement le cas lorsque l’audience se déroule «en présentiel», il appartient au juge d’organiser et de conduire la procédure, de s’assurer du bon déroulement des échanges entre les parties et de veiller au respect des droits de la défense ainsi que du caractère contradictoire des débats. De même, il revient au greffe de rédiger le procès‑verbal des opérations réalisées.
11. Suppression de l’audience
En dehors du contexte de la crise sanitaire, le législateur français a prévu la possibilité de supprimer l’audience devant initialement se tenir. Ainsi, le récent[41] article L. 212‑5‑1 du code de l’organisation judiciaire énonce, dans un premier alinéa, que devant le (seul) tribunal judiciaire, «la procédure peut, à l’initiative des parties lorsqu’elles en sont expressément d’accord, se dérouler sans audience. En ce cas, elle est purement écrite». Et le second alinéa de cet article d’ajouter que «toutefois, le tribunal peut décider de tenir une audience s’il estime qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande».
À titre de comparaison, pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire[42], l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020 – examinée dans la présente étude – prévoit également la perspective d’une telle suppression de l’audience devant normalement se tenir. Cependant, telle que régie dans cette ordonnance, non seulement l’initiative de cette suppression appartient aux juges et aux présidents des formations de jugement et non aux parties[43], mais également cette mesure n’apparait pas circonscrite aux seuls tribunaux judiciaires.
La portée de la décision du juge de supprimer une audience – qui peut être prise «à tout moment de la procédure»[44] – est telle que les conditions devant être remplies sont plus rigoureuses que celles – déjà mentionnées – prévues lorsqu’il s’agit «simplement» d’en limiter l’accès ou de la tenir de façon dématérialisée.
En premier lieu, il faut s’assurer du respect optimal des droits de la défense des parties impliquées. Pour ce faire, l’exercice de cette prérogative est limité aux situations dans lesquelles la représentation est obligatoire ou celles dans lesquelles les parties sont assistées ou représentées par un avocat. Cette précaution est particulièrement bienvenue. Par hypothèse, l’information de la juridiction se fera à partir des seules conclusions déposées par lesdits avocats. La présence de ces derniers, aux côtés des parties, permet de s’assurer du respect des droits et intérêts en cause.
En deuxième lieu, si le juge compétent décide que la procédure se déroulera finalement «selon la procédure sans audience», il doit en informer les parties par tout moyen[45]. Cette information est capitale car elle met les parties en mesure d’exercer un recours contre la décision. À ce sujet, on constate en effet que les parties disposent en principe[46] d’un délai de quinze jours[47] afin de s’opposer à la procédure sans audience[48]. Dans ce cas, l’audience aura lieu, le cas échéant de façon dématérialisée. À l’inverse, fort logiquement, si les parties ne forment pas régulièrement opposition dans le délai imparti par le juge, la procédure devient exclusivement écrite et la communication entre lesdites parties s’opère par notification entre avocats[49]. Ainsi qu’on peut le constater, s’il est vrai que l’accord préalable des parties n’a pas à être sollicité par le juge qui envisage de supprimer l’audience, les droits de la défense ne sont pas niés pour autant, dès lors que ces dernières peuvent exprimer leur désaccord à l’occasion de cette voie de recours.
En troisième lieu, de façon très opportune, le pouvoir règlementaire a expressément prévu la possibilité, pour le juge, de changer d’avis. Même si les parties ne se sont pas initialement opposées à ce que la procédure se déroule de façon purement écrite, le juge peut finalement décider de tenir une audience s’il estime «qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande»[50]. On retrouve ici une règle semblable à celle visée dans l’article L. 212‑5‑1 du code de l’organisation judiciaire, précité.
III. Simplifier les échanges
12. Décret n°2020‑1405 du 18 novembre 2020
Au soutien de l’ordonnance n°2020‑1405 du 18 novembre 2020, le pouvoir réglementaire a adopté – le même jour – un décret dont certaines dispositions ont pour objectif de simplifier les échanges des documents entre les parties et avec les juridictions. Étant assorties de garanties, les mesures ici prévues se veulent respectueuses de l’impératif de sécurité juridique. À ce titre, il est utile de préciser que la sécurité juridique est une exigence protégée sur le fondement de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. Or, contrairement à la Roumanie notamment, la France n’a pas souhaité faire usage de la possibilité offerte par l’article 15 de cette même Convention[51]. Pour rappel, en cas de «danger public menaçant la vie de la nation», cet article permet aux États de «prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l’exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international». En conséquence, la législation dérogatoire adoptée en France pour faire face à l’actuelle crise sanitaire doit respecter cet impératif, comme d’ailleurs les différentes exigences du droit à un procès équitable.
13. Modalités d’échange des documents entre les parties
En droit commun – c’est‑à‑dire, en période «normale» –, les échanges de documents entre les parties doivent être réalisés conformément aux dispositions des articles 671 et suivants du code de procédure civile; ces articles étant relatifs aux «notifications entre avocats». Il s’ensuit le respect d’un certain formalisme.
Or, en période de crise sanitaire, il est passé outre ces dispositions. En effet, il résulte de l’article 4 du décret n°2020‑1405 précité que «les parties peuvent échanger leurs écritures et leurs pièces par tout moyen dès lors que le juge peut s’assurer du respect du contradictoire». Dans le même esprit, l’article 6 de ce même décret ajoute que, à titre dérogatoire[52], le dossier d’un majeur protégé[53] peut être adressé «par tous moyens» aux mandataires judiciaires à la protection juridique des majeurs. Cette dérogation n’est toutefois pas étendue au certificat médical, lequel ne peut être consulté que suivant les règles énoncées dans le code de procédure civile.
La formule «par tout moyen» est volontairement imprécise afin de donner toute latitude aux avocats, sous réserve du respect de l’important principe du contradictoire[54]. On pense néanmoins au courrier (lettre recommandée avec demande d’avis de réception) et, plus encore, à l’usage des nouvelles technologies de la communication (e‑mail/usage du réseau privé virtuel des avocats ‑ RPVA), dont l’emprise ne cesse de croître en droit judiciaire français.
14. Modalités d’information des parties concernant l’aménagement de l’audience
Ainsi que cela a été indiqué précédemment, conformément aux dispositions de l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020, les juges disposent d’une certaine marge de manœuvre pour aménager les audiences[55]. Ces mesures d’aménagement doivent nécessairement être portées à la connaissance des parties. Or, là encore, le pouvoir règlementaire a souhaité simplifier les modalités de communication applicables.
À titre d’exemple, concernant la suppression d’une audience ou d’une audition[56], deux hypothèses sont envisagées. D’une part, le greffe avise les parties du renvoi de l’affaire ou de l’audition «par tout moyen, notamment électronique», lorsqu’elles sont assistées ou représentées par un avocat ou bien lorsqu’elles ont consenti[57] à la réception des actes sur le «Portail du justiciable»[58] du ministère de la justice et activé leur profil sur ce portail. D’autre part, «dans les autres cas», le greffe avise les parties «par tout moyen, notamment par lettre simple»[59]. On peut légitimement se demander si l’envoi d’une lettre simple aux parties est suffisant pour pleinement respecter l’impératif de sécurité juridique et, par extension, on peut espérer que le greffe opte – a minima – pour la lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
15. Modalités de communication des documents au tribunal
L’utilisation des nouvelles technologies de la communication est également privilégiée en ce qui concerne les échanges avec les juridictions et, particulièrement, avec le greffe de la juridiction compétente[60]. À ce sujet, par exemple, les agents de service de greffe affectés dans un service d’accueil unique du justiciable (SAUJ) peuvent assurer la réception et la transmission par voie électronique de l’ensemble des actes en matière civile lorsque la représentation n’est pas obligatoire, de certains actes en matière prud’homale[61] ainsi que des demandes d’aide juridictionnelle. Cependant, dans l’éventualité où il a été reçu par voie électronique, le document original qui a été établi sur support papier doit être produit par son auteur, avant qu’il ne soit statué sur sa demande. On le voit, sur ce point, la transition numérique n’a pas totalement été opérée.
16. Pérennité des mesures dérogatoires (?)
Pour conclure, on peut légitimement s’interroger sur l’avenir des solutions dérogatoires ici évoquées, lorsque la crise sanitaire sera enrayée. Dans ce futur – que nous espérons le plus proche possible –, combien d’entre elles, qui auront démontré leur efficacité en temps de crise, seront‑elles intégrées au sein des règles ordinaires de procédure civile ? Il est assurément bien délicat de répondre de façon péremptoire à cette interrogation. Cependant, souhaitons que ces mesures à vocation temporaire, qui se justifient pleinement dans le contexte dans lequel elles ont été adoptées, ne soient pas pérennisées ou réitérées, après la cessation de l’état d’urgence sanitaire, pour des raisons purement comptable et budgétaire.
[1] Tous les textes (lois, ordonnances, décrets) cités dans cette étude sont accessibles sur le site Légifrance, à l’adresse: https://www.legifrance.gouv.fr/.
[2] Voir notamment: Loi n°2020‑1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire. Plus récemment, voir Loi n°2021‑160 du 15 février 2021 prorogeant l’état d’urgence sanitaire, JORF n°040 du 16 février 2021. Cette dernière loi proroge l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021.
[3] À rapprocher avec l’article L. 111‑4 du code de l’organisation judiciaire, selon lequel: «la permanence et la continuité du service public de la justice demeurent toujours assurées».
[4] Tel qu’il est employé ici, le terme d’«ordonnance» correspond à un acte adopté par le gouvernement, avec l’autorisation du Parlement, dans les matières qui entrent dans le domaine de la loi (Constitution française, art. 38). L’autorisation donnée par le Parlement, au moyen d’une loi d’habilitation, est limitée dans le temps et dans son domaine. Une fois ratifiées par le Parlement, ces ordonnances prennent valeur de lois (S. Guinchard et Th. Debard (dir.), Lexique des termes juridiques 2020‑2021, Dalloz, 28e éd., 2020). L’emploi des «ordonnances», ainsi entendues, n’est pas si fréquent en droit de la procédure civile, lequel est principalement un domaine réglementaire et non législatif.
[5] JORF n°0074 du 26 mars 2020. La concernant, voir notamment C. Bléry, «Épidémie de Covid‑19: mesures de procédure civile», D. 2020, p. 780; L. Cadiet, «Un état d’exception pour la procédure civile à l’heure du coronavirus», JCP G. 2020, 471; N. Fricero, «Comment restaurer l’activité juridictionnelle: transférer les litiges à une autre juridiction et aménager la tenue des audiences», Procédures, mai 2020, étude 16; Y. Strickler, «Incidences de la crise sanitaire sur la procédure civile», Procédures, mai 2020, comm. 92. Adde, Circulaire du ministère de la justice du 26 mars 2020 n°CIV/02/20 de présentation de l’ordonnance n°2020‑304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété.
[6] JORF n°0124 du 21 mai 2020. Adde, Y. Strickler, «Crise sanitaire et procédure civile (suite)», Procédures, juillet 2020, com. 117.
[7] JORF n°0280 du 19 novembre 2020.
[8] Décret n°2020‑1405 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, JORF n°0280 du 19 novembre 2020.
[9] Du moins, en ce qui concerne sa partie consacrée aux règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale.
[10] Afin d’accélérer la mise en œuvre de ces textes, les dispositions de cette ordonnance et de ce décret se sont appliquées aux instances en cours, le lendemain du jour de leur publication au Journal officiel de la République française ‑ JORF (à savoir le 20 novembre 2020).
[11] En plus d’être affirmée de façon générale à l’article 1er de l’ordonnance n°2020‑1400, cette limitation temporelle est rappelée de façon ponctuelle dans les dispositions subséquentes. Voir notamment à l’article 2 de cette ordonnance, à l’égard de la mesure de transfert de compétences juridictionnelles (cf. infra, n° 6) ou à l’article 4, à l’égard de la limitation du nombre de magistrats au sein d’une formation de jugement (cf. infra, n°7).
[12] Ordonnance n°2020‑1400, art. 1er; Décret n°2020‑1405, art. 1er.
[13] Ordonnance n°2020‑304, 25 mars 2020, art. 2. Adde, H. Croze et R. Laffy, «Comment gérer les délais pendant la période d’urgence sanitaire ?», Procédures, juin 2020, étude 2; S. Amrani‑Mekki, «La part du droit (et de la justice) dans l’angoisse contemporaine: la computation des délais», Procédures, mai 2020, étude 15. Concernant sa portée dans le domaine du droit de l’exécution, voir S. Dorol et C. Laporte, «Procédures civiles d’exécution et état d’urgence sanitaire», Procédures, mai 2020, comm. 93. Toujours dans le domaine des procédures d’exécution, s’agissant du prolongement de la «trêve hivernale» en matière d’expulsion, voir aussi l’ordonnance n°2020‑331 du 25 mars 2020 (JORF, 26 mars 2020) et, plus récemment, l’ordonnance n°2021‑141 du 10 février 2021 (JORF n°0036, 11 février 2021).
[14] Le terme d’«ordonnance» correspond ici au nom donné à la décision prise par le premier président de la cour d’appel. Envisagé dans cette acception, ce mot est souvent utilisé pour qualifier la décision prise par le chef d’une juridiction ou celle prononcée par un magistrat statuant à juge unique.
[15] Ordonnance n°2020‑1400, art. 2.
[16] COJ, art. L. 111‑8.
[17] CPC, art. 341 et s.
[18] CPC, art. 351 et s.
[19] COJ, art. L. 213‑3
[20] COJ, art. L. 213‑6.
[21] Seules sont concernées, les affaires dans lesquelles l’audience de plaidoirie ou la mise en délibéré de l’affaire dans le cadre de la procédure sans audience a lieu pendant la période d’application de l’ordonnance n°2020‑1400 du 18 novembre 2020.
[22] Ordonnance n°2020‑1400, art. 4, alinéa 1er. À comparer avec les dispositions de l’article 3 du décret n°2020‑1405 qui maintiennent quant à elles le principe d’une formation de jugement collégiale, tout en permettant la tenue de l’audience par un seul juge. Aux termes de ce dernier article, «en procédure écrite ordinaire devant le tribunal judiciaire et en procédure avec représentation obligatoire devant la cour d’appel, le juge de la mise en état ou le magistrat chargé du rapport peut tenir seul l’audience pour entendre les plaidoiries. Il en informe les parties par tout moyen. Il rend compte au tribunal dans son délibéré».
[23] Code du travail, art. L. 1411‑1 et suivants.
[24] Cela signifie que la formation de jugement doit impérativement être composée d’autant de représentants des salariés, que de représentants des employeurs.
[25] Ordonnance n°2020‑1400, art. 4, alinéa 2.
[26] CPC, art. 435.
[27] Ordonnance n°2020‑1400, art. 3, II.
[28] Ordonnance n°2020‑1400, art. 3, I. La publicité de ces conditions d’accès est assurée par voie d’affichage.
[29] Ordonnance n°2020‑1400, art. 7.
[30] Par exemple, selon l’article 850 du CPC, sauf exception, devant le tribunal judiciaire, en matière de procédure écrite ordinaire, les actes de procédure doivent être remis à la juridiction par voie électronique et, cela, à peine d’irrecevabilité relevée d’office. De même, selon l’article 930‑1 du CPC, «à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique».
[31] Ordonnance n°2020‑1400, art. 5, alinéa 1er.
[32] Ces garanties sont d’autant plus importantes, que la décision de tenir une audience dématérialisée est une mesure d’administration judiciaire et, de ce fait, ne peut pas faire l’objet d’un recours.
[33] Il est à souligner que des règles identiques sont prévues pour les auditions devant être réalisées par un magistrat.
[34] Ordonnance n°2020‑1400, art. 5, alinéa 1er.
[35] À savoir par une décision insusceptible de recours.
[36] À savoir celles permettant d’être à même de s’assurer de l’identité des personnes ainsi que de garantir la qualité de la transmission et de la confidentialité des échanges.
[37] Ordonnance n°2020‑1400, art. 5, alinéa 2.
[38] Ordonnance n°2020‑1400, art. 5, alinéa 4.
[39] Sont expressément visés: «les membres de la formation de jugement, le greffier, les parties, les personnes qui les assistent ou les représentent en vertu d’une habilitation légale ou d’un mandat, les techniciens et auxiliaires de justice ainsi que les personnes convoquées à l’audience ou à l’audition».
[40] Ordonnance n°2020‑1400, art. 5, alinéa 3.
[41] Cet article a été créé par la loi n°2019‑222 du 23 mars 2019.
[42] La mesure ici présentée ne s’applique qu’aux affaires dans lesquelles la mise en délibéré de l’affaire est annoncée pendant la période couverte par l’ordonnance n°2020‑1400.
[43] Sur la conformité à la Constitution française de ce type de solutions, voir Cons. const., 19 novembre 2020, n°2020‑866 QPC.
[44] Ordonnance n°2020‑1400, art. 6, alinéa 1er.
[45] Idem.
[46] En cas d’«urgence», ce délai peut être réduit par le juge ou le président de la formation de jugement.
[47] Bien que le texte ne le précise pas, on peut penser que la période de quinze jours débute à compter du moment où les parties sont informées de la décision du juge relative à la suppression de l’audience.
[48] Il y a là une différence majeure avec la décision – évoquée précédemment (supra n°10) – prévoyant que l’audience se tiendra de façon dématérialisée, laquelle n’est pas susceptible de recours et, en conséquence, s’analyse en une mesure d’administration judiciaire.
[49] Ordonnance n°2020‑1400, art. 6, alinéa 2.
[50] Ordonnance n°2020‑1400, art. 6, alinéa 3. Dans le domaine spécifique des soins psychiatriques sans consentement, on reconnait à la personne hospitalisée la possibilité de demander, à tout moment, à être entendue par le juge des libertés et de la détention. Une telle audition peut alors être réalisée par tout moyen permettant de s’assurer de son identité et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges (Ordonnance n°2020‑1400, art. 6, alinéa 4).
[51] À ce sujet, voir N. Fricero, «Mesures de lutte contre le Covid‑19», Procédures, juin 2020, comm. 107.
[52] Plus exactement, il s’agit d’une dérogation par rapport aux règles insérées aux articles 1222 à 1223‑1 du code de procédure civile.
[53] Un majeur qui est dans l’impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts – en raison d’une altération de ses facultés mentales ou corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté – peut bénéficier d’une des mesures de protection (telle que la tutelle ou la curatelle) prévues aux articles 425 et suivants du code civil.
[54] Sur ce principe directeur du procès civil français, voir les articles 14 et suivants du code de procédure civile.
[55] Voir supra n°s 8 à 11.
[56] Décret n°2020‑1405, art. 2.
[57] CPC, art. 748‑8 du code de procédure civile.
[58] Depuis le 21 février 2020, ce portail permet non seulement aux justiciables d’adresser des requêtes par voie électronique à certaines juridictions civiles, mais aussi de bénéficier de la part du greffe d’informations sur l’état d’avancement de l’affaire dans laquelle ils sont impliqués (arrêtés du 18 février 2020, JORF n°0045 du 22 février 2020).
[59] Dans un souci de protection du défendeur, il est prévu que si ce dernier ne comparaît pas à l’audience à laquelle l’affaire est renvoyée et s’il n’a pas été cité à personne, la décision prononcée sera qualifiée de «jugement par défaut». Une telle qualification permet au défendeur de former une opposition contre cette décision, (adde, CPC, art. 571 et s.).
[60] Décret n°2020‑1405, art. 5.
[61] Il s’agit des requêtes et des demandes de délivrance de copies certifiées conformes, d’extraits et de copies certifiées conformes revêtues de la formule exécutoire.
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